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Étretat

Par Ana Paula Arendt*

Dieu est le premier poète du monde. Dieu, le mot puissant pour dire: Beauté. Avant que les poètes soient tous nés, Dieu a fait ses vers avec la terre surmontée. Étretat: un état d’être. Un éblouissement. L'étreinte entre la terre et la mer nous offre une plage de galets, les pierres roulées à la perfection par l’eau enveloppante… Ils font du sable à l'intérieur d'une horloge immense, indiquant combien de temps le temps peut durer… Et voici le sable arrêté. L’explication pour y arriver est aussi haute. On cherche un galet qui soit le plus parfait: des pierres ne sont toutes les mêmes, des pierres qui nous regardent avec leurs visages, dans un jardin enchanté. Et mon enfant cadet fait tomber celle qui lui fait une grimace, mais par accident, de cela un soudain éclat de rire… Mais une grimace vue sur un galet n'était pas une pierre du tout, c’était une lettre d’un artiste pour faire sentir nos visages. Et on touche un arbre pour remplir le jardin avec des sons d’une petite boîte à musique: c’est le même arbre, mais à chaque fois une mélodie différente. Labyrinthe féerique, tunnels de niches et buissons... Moi, je ne cherche que des pierres qui sont pierres, et je préfère que la plus rond et velouté, la que soit plus dorée, laiteuse, éticelante: je cherche une pierre qui surgit à mes rêves sans aucune raison préalable, pendant que je regardait le coucher du soleil. La pierre est interdite: je ne peux que la toucher. C'est le mur entre la mer et des falaises. Alors. Pourquoi elle sort de la terre et arrive à mon rêve? Je ne sais pas, encore je la cherche à chaque crépuscule. Et pendant cela, je rencontre à ma recherche les cris joyeux de mes enfants, de tous les êtres vivants qui sortent de la terre, de son ventre, les oiseaux, ses chants pour faire tissage du matin… Ce sont les mêmes chantes, c’est le même paysage, c’est le même jour: mais Dieu a caché quelque chose incroyable dans l’âme des choses qu’on voit tout le temps. Rappelle-toi, qu’il y a des gens qui regardent Étretat tous les jours…? On marche sur des galets, pour masser les chaussures, dans un état d’être émerveillé. On se cache parmi eux. On trouve une église pour marcher autour d’une ville du passé. Et on regarde alors depuis ce lieu, où Dieu se révèle le premier poète, qu’Il a créé deux portes. La première est une grande porte d’une falaise, qui nous amène à des endroits plus élevés, où on a peur de la mort; où l'on peut tout voir du point de vue des oiseaux, qui ne vient à la terre pour se servir d’elle. Là-bas où on se trouve le conquérant du monde, même sans le savoir, car la vision d'un paysage c’est une rencontre avec le Premier Poète qui l’a créée, et la rencontre est plus amusante que la victoire sur le monde devenu soi-même. La deuxième est la porte de la falaise si petite à nos yeux, la porte de rêves… La porte qui s’ouvre aux mémoires de notre enfance et des choses imaginés, la porte de mélange entre l’avenir et des choses du passé. La vie est une chose crue et grande… Un souvenir qui grandit au fur et à mesure qu'on s'en rapproche. On doit cuisiner la vie avec le temps, jusqu'à ce qu'elle arrive à devenir une chose douce et soluble, faite de tous les jus de vie. Je trouve des perles dans un bouillon d’huîtres, les anecdotes de Rochefoucauld: et je les remets comme cadeau. Mais de qui sont ces mains je sens à moi, heureux de cuisiner, celles qui me faisaient tomber à moi-même et devenir moi-même? Je te promets que je les trouverai. Des oiseaux volent, des fleurs chantent ses chansons d’hiver, des roses rêvent, celles qui dorment et reviennent, dorment et reviennent… L’année est la mère de plusieurs fragrances qui nous emballe: je respire l'odeur du lin et du laurier des bois… Le bain d’huiles fraîches de pin sylvestre, de boisées de cèdre et de l’olive… Des élixirs du griottier pour des abeilles e les Calvados pour l’homme, le feuillage panaché de chèvrefeuille pour des tonnelles, treillages et grillages, les petits pots de quelques hellébores, de jacinthes bleus et pourpres dans les fenêtres des grand-mères… On réveille avec les mêmes voix des goélands. Leur repas est prêt: la sole, queue de lotte, des coquilles, les sconges de thon, des couteaux, des praires, des anchois marines, des bigorneaux cuits au sel, des bulots, des merlans, des barbus, des turbots gros et petits, les pièces de crab, les dos de lieu noir, les ailes de raies, les filets de dorades sauvages, les houssettes, les filets de juliennes, des gros et petits carrelets… On partage un déjeuner avec des oiseaux, l’homme: moi et celui qui me lit. Il n'y a qu'une seule petite piloselle, pendant l'hiver, gardienne de chaque buisson… Et qui va nous raconter le même jour suivant, sans nous ennuyer jamais? Dieu, car Celui qui est le premier poète et aussi le dernier poète du monde.

* Ana Paula Arendt, nom de plume de R. P. Alencar, est une poète et diplomate brésilienne, membre correspondante de l'Académie des Sciences de Lisbonne et de l'Académie des Sciences de New York.


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